En seconde, le programme de Sciences numériques et technologie (SNT) peut être l’occasion de mettre en œuvre des « mini-projets » afin d’aborder des problématiques historiques ou, en l’occurrence, géographiques. La séquence proposée ici mobilise ainsi les compétences acquises par les élèves en matière de « traitement des données structurées » (filtre, tri, calcul, ...), de géolocalisation et de cartographie numérique pour étudier les mobilités pendulaires.
À travers l’enjeu de santé publique que représente la réduction de la pollution automobile, il s’agit de placer les élèves dans une démarche à la fois scientifique et civique. Dans un premier temps, il élaborent puis mettent en œuvre un protocole de traitement de données géolocalisées afin de modéliser les émissions automobiles de dioxyde de carbone. Dans un second temps, ils sont conduits à analyser les résultats obtenus afin de proposer des pistes de réduction de la pollution à laquelle contribuent ces rejets.
Les difficultés rencontrées par les élèves sont doubles. Elles résident, en premier lieu, dans l’élaboration d’une analyse pertinente des données mises à leur disposition. Elles sont liées également à leurs inégales capacités à mobiliser des connaissances issues de disciplines différentes (Physique pour le calcul de la vitesse, Mathématiques pour le calcul de la longueur d’un segment dans un repère orthonormé, ...). Ces obstacles se doublent par ailleurs d’un inégal investissement des élèves dans les apprentissages en SNT, notamment en matière de programmation avec Python. Aussi, nous avons envisagé différentes pistes pédagogiques en fonction de leurs différentes compétences et appétences.
Collecte des données
Les données de géolocalisation exploitées par les élèves ont été collectées depuis un véhicule automobile à motorisation thermique (essence) depuis Manéglise, une commune de la couronne périurbaine, vers le pôle urbain de l’aire urbaine du Havre (Seine-Maritime, Normandie). L’enregistrement s’est déroulé le matin, entre 8 h 15 et 8 h 45. Il a été réalisé par nos soins à l’aide de l’application NMEA Tools Pro [1].
Les données enregistrées peuvent être téléchargées ci-dessous :
Étape 1 - Décoder une trame NMEA 0183 (protocole de communication avec un GPS)
Après présentation des objectifs de la séquence, les élèves découvrent les données enregistrées avec l’application NMEA Tools Pro. C’est l’occasion d’insister sur les nécessaires nettoyage et tri à réaliser avant d’envisager un traitement pertinent de ces données. En l’occurrence, les données collectées mêlent différents types de trames. Seules les trames NMEA 0183 sont exploitées par les élèves. Dans un premier temps, la nature, le format et la fiabilité des données de géolocalisation transmises par un récepteur GPS et formulées selon la norme élaborée par la National Marine Electronics Association sont exposés aux élèves. Un rapide exercice permet de vérifier ensuite qu’ils sont capables d’identifier correctement l’horaire et les coordonnées géographiques de transmission d’une telle trame mais également d’en mesurer la fiabilité [2].
Étape 2 – Élaborer un protocole de traitement des données pour estimer les émissions de dioxyde de carbone générées par les mobilités pendulaires dans l’aire urbaine du Havre
Il s’agit pour les élèves d’élaborer une démarche de résolution de problème en précisant les différentes étapes du traitement des données de géolocalisation. Ils doivent également mesurer les limites de ce dernier.
Le calcul des émissions de dioxyde de carbone d’un véhicule automobile est estimé à partir d’une équation [3], fournie aux élèves, qui requiert de disposer de la vitesse du véhicule.
Les trames NMEA permettent de calculer en premier lieu la distance parcourue à partir des coordonnées géographiques (latitude, longitude) des points successivement parcourus par le véhicule. La vitesse du véhicule est ensuite aisément estimée car les points géolocalisés sont enregistrés toutes les 15 secondes. Le fichier de données transmis aux élèves est en effet simplifié [4] de manière à traiter un nombre moins conséquent de données.
Cette démarche de traitement des données ne peut cependant aboutir qu’à une estimation des émissions de dioxyde de carbone du véhicule. En effet, la surface parcourue par le véhicule n’est pas plane (rotondité de la Terre, altitudes différentes). Par ailleurs, les segments mesurés par les élèves ne suivent pas toujours les courbes des infrastructures routières ...
La cartographie des points parcourus par le véhicule et des segments mesurés par les élèves permet d’illustrer ces limites :
Notons, par ailleurs, que l’écart de 15 secondes entre deux enregistrements ne permet pas toujours de correctement prendre en compte les ralentissements du véhicule occasionnés par le trafic à l’entrée de ville...
Selon les classes, nous avons soit élaboré le protocole de traitement des données et mesuré ses limites en commun avec les élèves soit guidé puis validé une réflexion menée par groupe de deux.
Étape 3 - Traiter les données
Le traitement des données simplifiées mises à disposition des élèves sur l’espace numérique de travail de l’établissement est laissé à la libre appréciation des élèves. Pour la majorité d’entre eux, ils optent pour le tableur de la suite LibreOffice. Une minorité les exploite grâce à la librairie pandas de Python. Dans les deux cas, ils réinvestissent des compétences abordées lors d’une précédente séance (ouverture et enregistrement d’un fichier au format *.csv, ajout d’une nouvelle colonne de données à une feuille de calcul ou à un dataframe).
Le fichier de données dont disposent les élèves est le suivant :
La production finale de chaque groupe prend la forme d’un fichier *.csv qui permet d’estimer la quantité de dioxyde de carbone émise entre deux points du trajet du véhicule automobile pris comme exemple dans ce travail.
Étape 4 - Cartographier les émissions estimées
Dans un dernier temps, les élèves sont conduits à cartographier les résultats de leur travail. Pour ce faire, nous avons privilégié l’usage d’un système d’information géographique, en l’occurrence QGIS. Une jointure [5], c’est-à-dire le fait de lier une couche géographique avec une table de données, est alors nécessaire pour associer chaque segment représenté sur la carte au fichier de données enregistrés par les élèves et donc à l’estimation des émissions de de dioxyde de carbone. Il est ensuite possible de représenter les segments parcourus par le véhicule en fonction de la quantité de dioxyde de carbone émise sur cette distance :
Étape 5 – Réduire les émissions de dioxyde de carbone générées par les mobilités automobiles dans l’aire urbaine du Havre
Il s’agit pour les élèves d’interpréter les résultats cartographiés, de les analyser et de formuler des pistes pour réduire les émissions de dioxyde de carbone liées aux mobilités pendulaires. Pour ce faire, ils identifient les sections du trajet qui donnent lieu aux plus importantes émissions de dioxyde de carbone afin d’en déterminer les causes possibles (limitations de vitesse, ralentissement du trafic lié au passage de deux à une voie, à la présence de feux tricolores, saturation du trafic, …). Ensuite, ils formulent des hypothèses qu’ils valident ou infirment en croisant les données qu’ils ont cartographiées avec les indications tirées de l’analyse des autres couches d’information. A l’issue de cette analyse, ils rédigent leurs propositions en vue de réduire les émissions de dioxyde de carbone générées par les mobilités automobiles de travail dans l’aire urbaine du Havre sous la forme d’un paragraphe argumenté et justifié. Cette production écrite est déposée sur l’espace numérique de travail.